Droit du travail France – Cass. soc. 26-6-2024 n° 22-10.709 F-D, Sté Wavestone c/ W.
Le débauchage de salariés par un recruteur au profit d’une société tierce constitue une faute lourde lorsqu’une intention de nuire est caractérisée. C’est ce que rappelle la Cour de cassation dans son arrêt du 26 juin 2024 (n° 22-10.709), rendu entre la société Wavestone et l’un de ses anciens chargés de recrutement.
La faute lourde est caractérisée lorsque le salarié commet des actes fautifs dans le seul but de préjudicier à son employeur ou, comme en l’espèce, lorsqu’il agit dans son intérêt personnel tout en ayant conscience du préjudice causé à l’entreprise. Dans cette affaire, un salarié chargé de recrutement senior s’était livré à plusieurs actes pendant l’exécution de son contrat de travail, bien qu’il soit lié à une clause d’exclusivité avec son employeur.
Parmi ces actes, le salarié a recruté des salariés pour une société tierce, dont les profils étaient proches de ceux recherchés par son employeur, présent dans le conseil en management et en systèmes d’information. Il a également participé au débauchage de plusieurs salariés de son employeur, en utilisant les informations et le système d’information mis à sa disposition, et a présenté à la société tierce des candidatures initialement destinées à son employeur.
Licencié pour faute lourde, le salarié a contesté la décision. La cour d’appel avait estimé que ce licenciement reposait sur une faute grave, arguant que l’intérêt personnel poursuivi par le salarié ne permettait pas d’établir une intention de nuire. Cependant, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, estimant que le fait de travailler pour une société tierce, en utilisant les moyens de l’employeur pour débaucher des salariés et détourner des candidatures, était suffisant pour caractériser l’intention de nuire.
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La jurisprudence rappelle par ailleurs qu’à l’instar de la faute grave, la faute lourde prive le salarié des indemnités de licenciement et de préavis, mais lui laisse droit à l’indemnité compensatrice de congés payés. Toutefois, seule la faute lourde peut engager la responsabilité civile du salarié à l’égard de son employeur et peut lui faire perdre le bénéfice de la portabilité des couvertures santé et prévoyance en cas de chômage.
Cet arrêt illustre la nécessité pour les employeurs de pouvoir identifier et sanctionner les comportements portant atteinte à leur intérêt, en particulier lorsque le salarié détourne les moyens de l’entreprise à des fins concurrentielles. L’obligation de fidélité et de loyauté envers l’employeur reste un fondement essentiel du lien contractuel et ne saurait être ignorée par les salariés, même en l’absence de clause d’exclusivité.